La Grande Absinthe (Artémisia Absinthium) était utilisée pour soigner les maux depuis l’Antiquité. En lui ajoutant de l’anis, on obtenait un élixir dont le succès était assuré. On prescrivait alors des concoctions aux malades et le secret de cet élixir fut vite racheté. C’est ainsi que s’installèrent les premières distillations d’Absinthe.
Très vite, l’Absinthe s’affirme. L’Absinthe part en 1830 avec les militaires à la conquête des territoires d’Outre-mer. L’Absinthe leur servait alors à assainir l’eau, tout autant qu’à soigner le mal du pays. À leur retour, ils continuèrent à déguster le breuvage. La bourgeoisie admirative de ses soldats goûte à cette boisson et l’apprécie, tandis que les artistes toujours à la recherche de plaisirs nouveaux, la découvrent à leur tour.
Le consommateur disposait soudain d’une boisson aux puissants arômes de plantes, dans laquelle on ajoutait de l’eau bien fraîche. Mais pas n’importe comment. Il fallait étonner son Absinthe en laissant tomber l’eau goutte à goutte sur le sucre posé sur la cuillère ciselée en métal. Le sucre étant dissout, l’eau pouvait enfin s’accélérer en fin filet et « battre l’Absinthe » jusqu’à la mixtion complète, véritable alchimie entre l’eau et les essences de plantes.
Les artistes vivaient l’Absinthe. Fille moderne et provocatrice, elle envoûtait. Elle entraînait les buveurs dans les rêves les plus insensés et lorsqu’ils avaient du génie, ils savaient trouver les mots qu’il fallait pour parler de leur petite muse aux yeux verts.
A partir de 1860, l’Absinthe gagne le milieu ouvrier et connaît alors une vogue effrénée qui la hisse au rang de « boisson nationale ». Mais rapidement, elle va devenir le symbole de l’alcoolisme.
Bouc émissaire de tous les maux provoqués par ce fléau, intense à la fin du XIXème siècle, la Fée verte devient le « péril vert ».
Les ligues antialcooliques, nouvellement créées, et les lobbies du vin effrayées par le succès de l’absinthe font pression sur le gouvernement pour obtenir sa totale prohibition.
Il faudra alors attendre la guerre de 1914 pour que le gouvernement, soucieux de ne pas faire plus de mécontents qu’il n’y en avait déjà, finisse par prendre quelques mesures restrictives. Jugées insuffisantes, elles seront complétées par une nouvelle proposition de loi qui sera acceptée en mars 1915, interdisant la production et la commercialisation de l’Absinthe.